Avant d'aller plus en avant dans la prise de conscience en matière de développement du numérique, il me semble important qu'un dialogue et un esprit de partage collectif, puissent s'instaurer dans notre pays. Les réseaux sociaux comme Facebook, Linkedin, ou encore la plateforme Localinfo à laquelle je collabore, jouent un rôle important dans ce débat sur la transition numérique. Mais c'est à mon avis insuffisant, car le numérique ne touche pas uniquement la communication ou l'information mais également la production et la consommation de biens et de services.
Nous parlons de l’automatisation et de la dématérialisation, entraînant l’emploi et la formation dans des mutations profondes et parfois douloureuses mais essentiel pour notre futur. En fait, ce sont toutes les habitudes nous permettant d’échanger et de commercer, de faire partie de communautés, de projets, d’entreprises et de la société qui se sont transformées sous l’effet du numérique.
Pour autant les inégalités économiques, sociales et culturelles entre les citoyens existent toujours même si l'on constate qu'elles ont diminué, le déploiement des technologies de l’information et de la communication dans les sociétés occidentales ayant, dans certains secteurs, fait reculer les inégalités sociales et économiques. Mais tout n'est pas résolu pour autant car dans d'autres secteurs, c'est plutôt l'effet inverse.
Pour avancer dans le même sens, la révolution numérique doit être au cœur des territoires urbains et ruraux pour éviter une augmentation des inégalités laquelle pourrait fissurer davantage notre société. Je tiens à alerter sur le fait que, tant que nous aurons des inégalités entre les territoires urbains et ruraux sur les innovations numériques, le fossé continuera de se creuser. Celui-ci ne pourra se combler qu'avec l'accès au très haut débit pour tous, l'évolution des axes de transports avec la diffusion des applications en mobilité , l’expansion des réseaux sociaux, l’informatisation de la quasi-totalité des métiers, la multiplication des services en ligne commerciaux et administratifs, ainsi que l'accompagnement sur la formation des citoyens les moins formés, les plus fragilisés et les plus précaires.
« La culture et les pratiques numériques doivent être le levier d’une plus grande justice sociale »
Alors aujourd'hui, être équipé et connecté, avoir accès au haut ou très haut débit, ne suffit pas pour faire partie cette société en pleine mutation, pour monter dans le train de son évolution technique, pour ne pas être pris de vitesse par l’accélération de celle-ci. Plus que jamais nous avons besoin d'un accompagnement à une formation qui permettra d'en terminer avec cette absence de culture et de pratiques numériques « populaires » laquelle a contribué à la création et à l’aggravation de l’exclusion, du manque de qualification et de compétences, du chômage et de la pauvreté. Et surtout en France de la perte de confiance en soi et dans le changement de paradigme de notre société.
A ce jour, les politiques publiques numériques ont été de classiques politiques de modernisation portant sur les réseaux et les équipements et, dans une moindre mesure, sur les services et les usages. Il me semble urgent qu’elles deviennent des politiques culturelles, éducatives et sociales.
L'impulsion que souhaite donner le Gouvernement par son Secrétaire d'État chargé du Numérique, Mounir Mahjoubi, semble aller dans le bon sens. En effet il me semble opportun pour notre pays de changer de regard sur le numérique et, pour les élus et les décideurs, de comprendre que les services et les usages de demain peuvent être un facteur de renaissance économique pour tous les territoires qu’à la condition que la culture et les pratiques numériques soient aussi le levier d’une plus grande justice sociale. Mais aussi et surtout de nouvelles solidarités, d’opportunités d’émancipation individuelle et de transformations collectives permettant à chacun de trouver sa place dans la société. Ce changement de regard ne pourra se faire que par un travail collectif mais aussi par la volonté de chacun d'entre nous de vouloir améliorer son quotidien.